GIMP 3.0 : lancement officiel d’une nouvelle ère pour la retouche d’image libre

Partage

Le 16 mars 2025, l’équipe de développement de GIMP a annoncé la sortie officielle de GIMP 3.0, la première version majeure de ce logiciel libre de retouche d’image depuis 2018. « GIMP 3.0 est enfin sorti ! Il s’agit du résultat de 7 années de dur labeur par des développeurs, designers, artistes et autres membres bénévoles de la communauté » explique l’annonce officielle, soulignant le long chemin parcouru pour aboutir à cette version tant attendue. Avec GIMP 3.0, souvent considéré comme la principale alternative à Photoshop dans le monde open source, les créateurs vont pouvoir en faire « plus, mieux, plus facilement et plus rapidement » qu’auparavant. Cette nouvelle mouture apporte en effet une refonte technique en profondeur (portage vers GTK3, interface modernisée, support des écrans HiDPI), des fonctionnalités créatives majeures (comme l’édition non destructive ou la sélection multiple de calques), ainsi que de nombreuses améliorations de performance et de compatibilité. Tour d’horizon de l’histoire de GIMP et des nouveautés offertes par la version 3.0, et des bénéfices concrets qu’elle apporte aux utilisateurs finaux.

Image : Écran de démarrage (splash screen) de GIMP 3.0, illustré par Sevenix (CC BY-SA 4.0).

Historique de GIMP : des origines aux portes de la version 3.0

GIMP, acronyme de GNU Image Manipulation Program, est né en 1995 de l’initiative de deux étudiants de l’Université de Berkeley, Spencer Kimball et Peter Mattis. Insatisfaits des outils existants, ils lancent ce qui deviendra le plus célèbre logiciel libre de retouche d’images. Le premier public visé était la communauté Unix/Linux, afin d’offrir une alternative gratuite aux logiciels commerciaux de l’époque (« Windoze » et Mac« intoy » dans les termes humoristiques de l’annonce initiale). Le projet prend rapidement forme : dès janvier 1996, la version 0.54 est publiée, introduisant déjà des fonctionnalités novatrices (outils de dessin, calques, fonction “Undo” révolutionnaire pour l’époque). Après le départ des créateurs en 1997, GIMP devient un projet communautaire à part entière, maintenu par des bénévoles du monde entier.

Au fil des années, GIMP s’est imposé comme un pilier de l’écosystème open source, offrant aux photographes, graphistes et bidouilleurs une solution complète de traitement d’images sans coût et sans verrou propriétaire. Le logiciel a connu plusieurs étapes majeures : GIMP 1.0 voit le jour en juin 1998, suivi par GIMP 2.0 en 2004. En 2012, la version 2.8 apporte l’interface à fenêtre unique très attendue et affine l’ergonomie du logiciel. Il faudra ensuite patienter six ans pour GIMP 2.10 (sorti en 2018), qui introduit le moteur d’images GEGL pour une gestion améliorée des couleurs et des images en haute définition (16/32 bits) et jette les bases des évolutions futures. Durant toutes ces années, GIMP est resté le logiciel libre de retouche d’images par excellence, souvent préinstallé sur les distributions Linux et disponible sur Windows et macOS, servant de « Photoshop gratuit » pour des millions d’utilisateurs.

L’annonce de GIMP 3.0 marque ainsi l’aboutissement d’un cycle de développement exceptionnellement long. Dès 2015, les développeurs avaient planifié une profonde refonte technique, en particulier le port du logiciel vers GTK3 (la bibliothèque graphique GNOME de nouvelle génération). Une branche de développement 2.99.x a vu le jour, avec des préversions régulières depuis 2020, mais le chemin a été semé de défis. La transition vers GTK3 impliquait de réviser intégralement l’interface et une grande partie du code, tout en introduisant de nouvelles fonctionnalités ambitieuses. Après plusieurs versions candidates fin 2024 (RC1, RC2, RC3) et de nombreux tests par la communauté, la version stable 3.0 est enfin prête au printemps 2025. GIMP 3.0 constitue un jalon majeur dans l’histoire du logiciel. Bonne nouvelle, l’équipe indique qu’à l’avenir le cycle de sortie sera accéléré : plutôt que d’attendre à nouveau 6 ou 7 ans, des versions 3.2, 3.4, etc., devraient arriver bien plus fréquemment (l’objectif annoncé est de livrer GIMP 3.2 d’ici un an). Cela signifie que la communauté va pouvoir bénéficier d’évolutions continues sans longue attente, maintenant que la base de GIMP est modernisée.

Notons que GIMP reste un projet 100% libre et open source, publié sous licence GPL v3. Son développement est le fruit d’une collaboration internationale bénévole. « GIMP is made by volunteers, for everyone, like a friendly neighborhood association… except instead of being very local, we are pretty much international » confiait Jehan Pagès, l’un des mainteneurs du projet. Cet esprit communautaire se reflète dans la longévité du projet (plus de 25 ans d’existence) et dans l’enthousiasme suscité par chaque nouvelle version majeure. GIMP 3.0 ne fait pas exception : dès sa sortie, la communauté FOSS célèbre le réveil de ce « flagship » du libre, « blossoming again after a long hibernation » pour reprendre les mots d’un chroniqueur. Voyons en détail les nouveautés de GIMP 3.0 et ce qu’elles apportent.

Les nouveautés majeures de GIMP 3.0

Après sept ans de travail, GIMP 3.0 arrive bourré de changements. L’interface GTK3 de GIMP 3.0 est sans doute la première chose que l’on remarque : elle offre un look plus moderne et apporte de nombreuses améliorations visibles et invisibles. Mais ce ne sont pas les seuls atouts de cette version : édition non destructive, multi-sélection de calques, meilleure prise en charge des formats (dont PSD), outils et filtres enrichis, performances optimisées… Voici les principales nouveautés techniques à retenir.

Une interface modernisée (GTK3, HiDPI, Wayland…)

La migration de GIMP vers GTK3 (la dernière génération de la boîte à outils graphique GNOME) est au cœur de la version 3.0. Concrètement, cela se traduit par une interface visuellement rajeunie, plus cohérente avec les environnements de bureau actuels, et un meilleur support des technologies modernes. Par exemple, GIMP 3.0 supporte nativement Wayland (tout en restant compatible X11) et gère bien mieux les affichages HiDPI (Ultra HD) en adaptant automatiquement l’échelle de l’interface. Les utilisateurs de tablettes graphiques bénéficient d’un meilleur support de leur périphérique, et l’application prend désormais en charge les textes écrits de droite à gauche (arabes, hébreu…) sans glitch d’affichage. Le mode sombre est également mieux intégré, de même que l’utilisation du défilement à la molette dans divers contrôles de l’UI. Tout ceci contribue à une expérience plus fluide et agréable sur les systèmes actuels.

GIMP 3.0 introduit aussi un nouvel écran d’accueil interactif (Welcome Dialog) qui s’affiche au lancement du logiciel. Ce panneau d’accueil aide les nouveaux utilisateurs à se repérer et configurer l’interface : on y trouve des options de personnalisation (par exemple pour activer la barre de menu fusionnée avec la barre de titre, type client-side decoration, en un clic), des raccourcis vers des tutoriels ou notes de version, et des liens pour contribuer au projet. La personnalisation de l’interface a d’ailleurs été étendue : le système de thèmes utilise désormais du CSS, ce qui permettra à la communauté de créer plus aisément des thèmes graphiques sur mesure. Les adeptes d’une interface épurée pourront par exemple activer l’option de barre de titre fusionnée (qui combine les barres de menu et de fenêtre dans une seule barre d’en-tête) directement depuis cet écran de bienvenue, afin de gagner de l’espace vertical.

Interface de GIMP 3.0 sous Linux : on aperçoit la fenêtre principale avec l’icône mise à jour (nouveau Wilber) et, au premier plan, le nouvel écran d’accueil interactif qui présente le splash screen et diverses options de personnalisation.

Cette refonte technique s’accompagne de nombreux petits plus ergonomiques. Par exemple, le collage (Paste) d’une image crée désormais automatiquement un nouveau calque au lieu de coller sur le calque actif – un détail qui évite bien des frustrations lors du montage. De même, une nouvelle option “fusionner la barre de menus et le titre” est proposée pour ceux qui préfèrent une interface unifiée dans une seule fenêtre (cette option peut être activée dans l’onglet Personnaliser de l’écran d’accueil). En résumé, l’interface de GIMP 3.0 se veut plus moderne, flexible et adaptée aux écrans et usages de 2025, tout en conservant la possibilité de revenir au comportement classique (fenêtres séparées, menus traditionnels) pour ne pas dérouter les habitués. Cette mise à jour du socle technique ouvre aussi la voie à de futures évolutions d’ergonomie plus rapides, l’équipe ayant mis en place un groupe de travail dédié à l’UX pour les versions à venir.

Édition non destructive : filtres et effets à volonté

L’arrivée de l’édition non destructive dans GIMP 3.0 est une révolution attendue de longue date par les graphistes et photographes. Jusqu’à la version 2.10, appliquer un filtre modifiait définitivement le calque : si l’on voulait ajuster ce filtre a posteriori, il fallait annuler l’opération et recommencer, ce qui n’était ni pratique ni propice à l’expérimentation. GIMP 3.0 change la donne en introduisant les filtres non destructifs (NDE). Concrètement, la plupart des filtres GEGL courants peuvent désormais être appliqués de manière réversible : une fois le filtre ajouté, il reste modifiable à tout moment, même après plusieurs heures de travail ou après avoir enregistré le fichier ! L’équipe GIMP illustre cela par un cas d’usage parlant : « Besoin de revoir les réglages d’un filtre appliqué quelques heures plus tôt ? L’édition non-destructive des calques arrive dans GIMP 3.0 pour les filtres les plus courants. La prévisualisation dans la zone d’édition permet de voir les changements en temps réel ». En pratique, les filtres appliqués apparaissent dans le panneau des calques (sous forme de sous-éléments attachés au calque concerné, via le menu “Fx”) et l’on peut : régler à nouveau leurs paramètres, les désactiver ou les réactiver individuellement, en supprimer un en gardant les autres, ou encore fusionner définitivement ces effets une fois le résultat satisfaisant. Il devient ainsi possible d’empiler plusieurs effets sur un même calque et de peaufiner son rendu sans altérer les pixels d’origine – une flexibilité bienvenue qui rapproche GIMP des workflows professionnels d’Adobe Photoshop (calques de réglage, filtres dynamiques, etc.).

Techniquement, GIMP stocke ces filtres non destructifs dans le fichier XCF (format de projet de GIMP), de sorte qu’un fichier .xcf enregistré conserve tous les effets ajustables pour une session ultérieure. Si nécessaire, un simple clic sur l’option “Fusionner les filtres” permet de revenir au mode destructif classique (pour les utilisateurs qui préfèrent le comportement de l’ancienne version). À noter que même les textes bénéficient désormais d’une édition non destructive : lorsqu’on applique un style (contour, ombre portée, biseau, etc.) sur un texte, celui-ci reste éditable en direct sur la toile (on-canvas text editing) et les effets appliqués se mettent à jour en temps réel tout en permettant de modifier le contenu ou la police ultérieurement. GIMP 3.0 introduit en effet un nouveau filtre GEGL appelé “Styles” dédié à la stylisation de texte, qui permet d’ajouter toutes sortes d’effets visuels tout en conservant le texte modifiable. Il suffit de double-cliquer le calque de texte pour éditer le contenu, sans perdre les effets appliqués. Cette approche non destructive libère la créativité : on peut expérimenter différents filtres ou styles, combiner des effets artistiques, itérer sur une image sans crainte de se retrouver dans une impasse.

En un mot, l’édition non destructive dans GIMP 3.0 apporte un vrai changement de paradigme pour les utilisateurs avancés. Que l’on soit photographe ajustant finement un contraste ou graphiste appliquant plusieurs filtres artistiques, on gagne en flexibilité et en contrôle sur le résultat final. Cette fonctionnalité place GIMP à niveau avec les standards professionnels en termes de workflow d’édition d’images, tout en restant fidèle à l’esprit du libre où l’utilisateur garde la maîtrise de ses modifications de bout en bout.

Sélection multiple de calques et organisation facilitée

Autre nouveauté phare de GIMP 3.0 : on peut sélectionner plusieurs calques à la fois et agir sur eux simultanément. C’était une fonctionnalité réclamée depuis très longtemps par les utilisateurs venant d’autres logiciels : qui n’a jamais pesté, dans GIMP 2.x, de devoir déplacer dix calques un par un ou de ne pas pouvoir en redimensionner plusieurs simultanément ? Désormais, grâce à la multi-sélection de calques, ces manipulations sont un jeu d’enfant. Il suffit de Ctrl+cliquer sur plusieurs éléments dans le panneau des calques (ou d’utiliser Maj pour un intervalle) afin de créer une sélection multiple, et toutes les opérations de transformation, déplacement, rotation, mise à l’échelle, etc., s’appliqueront à l’ensemble des calques sélectionnés. L’annonce officielle se réjouit de voir que « l’organisation de vos calques est désormais très simplifiée grâce à la capacité de sélectionner plusieurs éléments à la fois, pour les déplacer ou les transformer ensemble ».

Cette amélioration d’ergonomie ne concerne pas que les calques : on peut également sélectionner simultanément plusieurs chaînes alpha ou plusieurs chemins dans les dialogues correspondants. De plus, GIMP 3.0 introduit la notion de “Layer sets” (groupes de calques nommés) qui remplace l’ancien système de calques liés : on peut regrouper des calques logiquement et les manipuler ensemble plus aisément. Cette fonctionnalité ravira les utilisateurs travaillant sur des compositions complexes comportant de très nombreux calques, en leur offrant de nouvelles possibilités d’organisation et de gain de temps.

En complément, signalons un nouvel outil de sélection “Paint Select” introduit à titre expérimental. Celui-ci permet de peindre directement sur l’image pour sélectionner progressivement une zone ou un objet (d’une manière similaire à l’outil de sélection d’objet d’Adobe Photoshop). Bien que cette fonctionnalité soit encore en phase de test et cachée par défaut (il faut l’activer via la section Playground des préférences pour l’essayer), son inclusion montre l’ambition des développeurs d’améliorer les outils de sélection dans GIMP. À terme, cela facilitera la sélection précise d’éléments complexes dans une image en combinant la gestuelle du pinceau et la détection de contours.

Performances accrues et meilleur workflow

Sous le capot, GIMP 3.0 bénéficie de multiples optimisations qui améliorent les performances et la fluidité d’utilisation. Les développeurs ont notamment revu l’architecture multi-thread afin d’exploiter au mieux les processeurs multi-cœurs. Résultat : certaines opérations intensives sont beaucoup plus rapides, comme la sauvegarde au format XCF ou l’application de filtres de peinture, grâce à une exécution rendue thread-safe et à la mise en cache du rendu. En clair, GIMP 3.0 tire mieux parti de votre matériel, ce qui se traduit par moins de latence lors des modifications sur les grandes images et des temps de chargement/rendu réduits.

Le passage à l’outil de construction Meson (abandonnant Autotools) a également accéléré les compilations du logiciel, ce qui profite indirectement aux versions distribuées plus stables et plus rapidement mises à jour. Pour l’utilisateur final, cela signifie aussi que les versions Flatpak, AppImage, Snap et autres paquets seront disponibles plus vite à chaque sortie, comme ce fut le cas dès l’annonce du 16 mars (GIMP 3.0 étant immédiatement proposé sur Flathub, en paquet Snap, en installeur Windows et en DMG macOS).

Côté flux de travail, plusieurs petits changements améliorent le quotidien : on a mentionné le copier-coller qui crée un nouveau calque par défaut, mais on peut ajouter aussi le zoom par pincement (sur les pavés tactiles) qui est désormais supporté pour zoomer sur la toile comme sur un smartphone. Le magnetisme de la grille et des guides a été enrichi pour faciliter les alignements. Un champ de recherche de calque par nom fait son apparition pour vite retrouver un calque dans une pile abondante. GIMP 3.0 introduit également une fonction pratique d’extension automatique des limites de calque : plus besoin de se soucier de la taille d’un calque avant de peindre, une option “Auto-expand layer” permet d’étendre dynamiquement le calque si vos coups de pinceau dépassent de sa zone. Fini le message d’erreur “vous avez dépassé les limites du calque” en plein dessin : le canevas s’étire pour suivre votre créativité.

On retrouve de nombreux autres affinements dans cette version, tels que la prise en charge du geste de pincement pour zoomer, de nouvelles options d’accrochage de la souris sur les objets, des options de contour de sélection plus étendues, l’élision des noms de fichiers trop longs dans les menus, etc.. Pris individuellement, ces changements peuvent sembler mineurs, mais mis bout à bout ils apportent un confort accru et un GIMP plus réactif. Les utilisateurs de longue date sentiront immédiatement la différence dans leur workflow quotidien : GIMP 3.0 est globalement plus rapide, plus stable et plus agréable à utiliser sur des projets lourds.

Compatibilité étendue (formats PSD, colorimétrie, etc.)

GIMP a toujours cherché à assurer la meilleure interopérabilité possible avec d’autres logiciels et formats. La version 3.0 franchit un cap à ce niveau en prenant en charge de nouveaux formats et en améliorant notamment la compatibilité avec Adobe Photoshop. Les fichiers PSD s’ouvrent désormais mieux dans GIMP 3.0, avec la possibilité de lire les images 16 bits par canal issues de Photoshop. L’export PSD a également été perfectionné : GIMP peut désormais enregistrer en PSD en conservant les métadonnées, les clipping paths (chemins de détourage) et même inclure un profil colorimétrique CMJN dans le fichier. Cela facilite grandement les échanges de documents entre GIMP et Photoshop dans des flux de travail mixtes – un atout pour les professionnels du graphisme qui naviguent entre les deux outils. Par ailleurs, GIMP 3.0 sait importer les fichiers PSB (grand format Photoshop) et prend en charge le tout nouveau format d’image JPEG-XL, garantissant une ouverture vers les formats d’avenir.

Au-delà de Photoshop, GIMP 3.0 supporte désormais les textures au format DDS BC7 (très utilisées dans le jeu vidéo), ce qui ravira les moddeurs et créateurs de contenu 3D. Le format TIFF est capable de charger les calques issus du logiciel Autodesk SketchBook. Le vénérable format BMP prend en charge les images 64 bpp et s’importe sans perte désormais. De plus, GIMP gère enfin l’ouverture des fichiers PSD en mode Lab 16 bits (profil de couleur CIE Lab) qui jusqu’ici posaient problème. En somme, échanger des fichiers avec d’autres applications devient plus simple : que ce soit pour reprendre un projet Photoshop dans GIMP ou exporter votre création vers une chaîne de production, GIMP 3.0 limite les incompatibilités.

La gestion des couleurs continue de progresser dans cette version, afin de faire de GIMP un éditeur d’image de niveau professionnel sur ce plan également. GIMP 3.0 étend son support des espaces colorimétriques au-delà du sRGB : il gère pleinement des profils comme Adobe RGB et peut manipuler des images en CMJN (CMYK) de façon plus fluide. L’épreuvage à l’écran (soft proofing) a été simplifié, avec un contrôle plus direct de l’activation du profil d’épreuve via la barre d’état de la fenêtre GIMP. Pour les photographes exigeants, ces améliorations assurent une meilleure fidélité colorimétrique et une intégration plus aisée dans des flux de travail d’impression ou de publication professionnelle.

Enfin, mentionnons que l’API de scripts et greffons de GIMP a été modernisée en 3.0. Les anciens scripts Python pour GIMP 2.x ne fonctionnent plus tels quels (il faudra que leurs auteurs les adaptent), mais en contrepartie la nouvelle API publique est beaucoup plus puissante et stable pour toute la série 3.x. Désormais, plusieurs langages sont utilisables pour écrire des plugins : outre le C et le Scheme (Script-Fu) historiques, GIMP 3.0 prend en charge les plugins en Python 3 (mise à jour depuis Python 2), ainsi que des liaisons pour JavaScript, Lua et Vala. Les développeurs de la communauté disposent donc de plus d’outils pour étendre GIMP, ce qui devrait conduire rapidement à la mise à jour des plugins populaires vers GIMP 3.x (d’ailleurs, des incontournables comme G’MIC ou Resynthesizer étaient déjà prêts à la sortie). À terme, cet écosystème de plugins enrichi profitera directement aux utilisateurs qui pourront ajouter de nouvelles fonctionnalités à GIMP selon leurs besoins (effets spéciaux, automatisation, etc.).

Un nouveau logo pour la mascotte Wilber

Pour la petite histoire, GIMP 3.0 arbore un nouveau logo. La mascotte emblématique Wilber (la petite créature grise aux grands yeux tenant un pinceau) a été relookée pour l’occasion. Le nouveau design, réalisé par la designer et réalisatrice Aryeom Han, est plus flat design et épuré tout en restant souriant. Ce lifting visuel s’inscrit dans la modernisation générale du logiciel. Les anciennes versions de Wilber ne sont pas perdues pour autant : le projet conserve dans son dépôt toutes les itérations précédentes de la mascotte depuis l’originale créée par Tuomas Kuosmanen en 1997. GIMP 3.0 affiche donc fièrement ce Wilber nouvelle génération dans son écran de démarrage et en icône de l’application – un symbole du renouveau du logiciel.

Des bénéfices concrets pour les utilisateurs finaux

Avec un tel florilège de nouveautés, qu’est-ce que GIMP 3.0 change concrètement pour les utilisateurs ? En bref : beaucoup de choses positives ! Que vous soyez photographe amateur, illustrateur, graphiste web ou simplement un utilisateur Linux habitué de GIMP, cette mise à jour va faciliter votre flux de travail et élargir le champ des possibles. Voici quelques exemples de bénéfices concrets pour différents profils d’utilisateurs :

  • Photographes : GIMP 3.0 devient un outil encore plus sérieux pour la retouche photo. L’édition non destructive des filtres permettra d’ajuster finement des réglages (exposition, courbes, balance des couleurs…) des heures après les avoir appliqués, sans altérer l’original. La gestion améliorée des profils colorimétriques (Adobe RGB, CMJN) et l’épreuvage simplifié garantissent une meilleure fidélité des tirages papier ou exports web. Ouvrir des fichiers PSD 16 bits provenant de Lightroom/Photoshop est désormais possible sans conversion préalable, ce qui facilite l’intégration de GIMP dans votre flux de post-production. Enfin, les optimisations de performance rendent l’édition de RAW (via des plugins comme Darktable) et le traitement de grandes images plus fluides.
  • Graphistes et illustrateurs : Les artistes numériques gagnent en liberté créative. La multi-sélection de calques vous fait économiser un temps précieux pour arranger vos compositions complexes – fini les déplacements ou transformations répétitives calque par calque. Les styles de texte dynamiques offrent de nouvelles possibilités typographiques (ombre, halo, etc.) sans casser la boîte de texte, idéal pour le design web ou la création de posters. Les nouveaux filtres GEGL (Inner Glow, Bevel, Styles…) enrichissent votre palette d’effets visuels. De plus, la meilleure prise en charge de la tablette graphique et du pincement pour zoomer rend le dessin sur GIMP plus intuitif, rapprochant l’expérience de celle d’outils spécialisés. GIMP 3.0 étant multiplateforme, les illustrateurs peuvent profiter de ces améliorations aussi bien sous Linux que sur Windows ou macOS selon leur environnement de travail.
  • Professionnels du web et du design : GIMP 3.0 consolide sa place d’outil polyvalent pour la création d’assets web. La compatibilité PSD améliorée signifie que vous pouvez collaborer plus facilement avec des collègues ou clients utilisant Photoshop – par exemple, récupérer une maquette PSD et l’exporter en différents formats optimisés sans mauvaise surprise dans les calques. Le support du format JPEG XL ou du PNG avec profils colorés garantit que vous tirez parti des derniers formats d’image pour le web performant. Les options de snapping (aimantation) plus fines et l’affichage pixel-perfect sur HiDPI aident à un design précis. Par ailleurs, l’API Python 3 et JavaScript permettra aux développeurs web d’automatiser certaines tâches dans GIMP (export multi-résolution, génération d’icônes, etc.) en écrivant facilement des scripts dans leur langage de prédilection. GIMP 3.0 se présente ainsi comme un atelier complet pour le graphisme web, sans coût de licence.
  • Utilisateurs Linux au quotidien : Pour tous ceux qui utilisent GIMP régulièrement sur leur système Linux (par exemple pour éditer des images personnelles, faire des montages simples, capturer et annoter des captures d’écran, etc.), cette mise à jour apporte un confort accru. L’interface remaniée s’intègre mieux à votre bureau (gestion du thème GTK, mode sombre, Wayland) et tire pleinement parti de votre écran haute définition. GIMP démarre plus vite, plante moins, et grâce au Flatpak/Snap, vous pouvez l’installer ou le mettre à jour très facilement sur n’importe quelle distribution. Toutes les petites améliorations (nouveau système de calques, export plus complet, outils plus conviviaux) rendent l’expérience plus agréable même pour un usage basique. En bref, GIMP 3.0 “just works” là où les anciennes versions pouvaient parfois frustrer par certains détails.
  • Anciens utilisateurs de Photoshop : Si vous avez longtemps travaillé sous Photoshop et hésitez à migrer vers un équivalent libre, GIMP 3.0 pourrait bien vous faire sauter le pas. Plusieurs lacunes historiques ont été comblées : on retrouve enfin la sélection de multiples calques, la gestion non destructive des effets, une interface plus familière (barre d’outils unifiée, thèmes personnalisables) et une compatibilité renforcée avec les fichiers PSD/ABR d’Adobe. Bien sûr, GIMP n’est pas un clone parfait de Photoshop et certaines habitudes devront être revues, mais avec des projets comme PhotoGIMP (un pack de personnalisation qui adapte GIMP pour ressembler davantage à Photoshop, à présent compatible avec GIMP 3.0), la transition est de moins en moins ardue. Pour les créatifs lassés des abonnements Adobe, GIMP 3.0 offre enfin une alternative crédible, sans coût et sans compromis sur les fonctionnalités essentielles – en témoignent les nombreux anciens “Photoshopiens” qui saluent les progrès réalisés. Comme le résume un commentateur : « for those recently bitten by Adobe’s subscription shenanigans, [GIMP] is definitely better than before. It may be time to take a fresh look ».

Un tournant pour le libre et la création numérique

Le lancement de GIMP 3.0 n’est pas qu’une simple mise à jour logicielle : c’est un événement marquant pour le monde du libre. Il démontre qu’un projet communautaire peut évoluer, innover et se maintenir face aux géants commerciaux, grâce à la passion et à la persévérance de bénévoles du monde entier. GIMP fait partie de ces applications emblématiques (aux côtés de Blender, Inkscape, Krita…) qui offrent à tous – particuliers, étudiants, professionnels – le pouvoir de créer sans barrière financière ou juridique. En apportant des fonctionnalités de niveau professionnel tout en restant gratuit et open source, GIMP 3.0 rappelle l’importance des valeurs du libre : accessibilité, partage du savoir et indépendance vis-à-vis des fournisseurs propriétaires.

Il reste bien sûr des défis à relever. Certaines fonctionnalités très avancées de Photoshop (comme la 3D, quelques filtres intelligents ou une intégration poussée entre outils de la suite Adobe) ne sont pas encore disponibles dans GIMP. Mais la feuille de route du projet est ambitieuse : les développeurs travaillent déjà sur la version 3.2 et au-delà, avec des améliorations prévues sur l’UI/UX, l’ajout d’outils nouveaux (on parle de calques de réglage, d’amélioration de la vectorisation, etc.), et une poursuite de l’optimisation des performances. Grâce à la nouvelle base stable posée par GIMP 3.0, ces avancées pourront être intégrées plus rapidement qu’auparavant.

En attendant, GIMP 3.0 est d’ores et déjà disponible en téléchargement sur le site officiel pour Linux (Flatpak, AppImage, paquet Snap…), Windows et macOS. Les principales distributions Linux proposeront cette version dans leurs dépôts très prochainement, si ce n’est déjà fait. N’hésitez pas à l’essayer dès maintenant pour vous faire votre propre opinion : la meilleure façon de découvrir toutes les nouveautés est encore de les tester sur vos projets personnels.

En conclusion, GIMP 3.0 marque le début d’une nouvelle ère pour la retouche d’image libre. Cette version tant attendue montre que le logiciel a mûri tout en restant fidèle à son ADN communautaire. Les améliorations d’ergonomie, de puissance et de compatibilité élargissent son audience potentielle et simplifient la vie de ses utilisateurs de longue date. GIMP 3.0 s’affirme plus que jamais comme une alternative libre et pérenne à Photoshop – une alternative fondée sur le partage et la liberté, qui place l’utilisateur au centre. C’est une belle victoire pour la communauté open source, et une invitation pour tous les créatifs à (re)découvrir ce que ce logiciel libre de retouche d’image a à offrir. Rendez-vous est pris pour les prochaines évolutions, mais d’ici là, profitons de cette version 3.0 : libre à vous de créer tout ce qui vous passe par la tête avec GIMP !

Sources : Annonce officielle de GIMP 3.0, notes de version GIMP 3.0, dépêche LinuxFr.org (traduction officielle), article OMG!Ubuntu, article The Register, blog MacStadium (interview de Jehan).

Articles à lire

Derniers articles